Le Maroc figure désormais parmi les pays africains les plus ciblés par les cyberattaques étatiques. Selon le dernier rapport publié par Microsoft sur la sécurité numérique, le Royaume a enregistré 26 offensives en un an, se plaçant derrière l’Égypte (32 attaques) et l’Afrique du Sud (31). Un classement qui traduit à la fois la montée en puissance technologique du pays et l’intérêt stratégique qu’il suscite auprès de puissances étrangères engagées dans une guerre numérique de plus en plus sophistiquée.
Le document, intitulé « Microsoft Digital Defense Report 2025 », brosse un tableau alarmant de l’évolution des cybermenaces. Plus de 120 pays ont été la cible d’attaques coordonnées entre 2024 et 2025, dans un contexte où les frontières entre espionnage, extorsion et désinformation s’effacent, au profit d’opérations hybrides alimentées par les technologies les plus avancées.
En Afrique, trois pays concentrent l’essentiel de ces cyberattaques d’origine étatique : l’Égypte, l’Afrique du Sud et le Maroc. L’Éthiopie (20 attaques) vient ensuite, suivie de l’Angola, du Kenya, du Nigeria, de la Tanzanie, du Mali, de la Namibie et du Botswana. Les cibles visées sont souvent sensibles : institutions publiques, centres de recherche, opérateurs énergétiques et entreprises du secteur technologique.
Microsoft identifie trois motivations principales derrière ces offensives : le vol de données (37 %), l’extorsion (33 %) et les attaques destructrices (19 %). Les objectifs sont le plus souvent financiers ou stratégiques. L’espionnage traditionnel, longtemps au cœur des préoccupations en cybersécurité, ne représente plus que 4 % des opérations détectées.
Autre constat préoccupant : la majorité des attaques exploitent encore des failles issues de systèmes obsolètes. Depuis la fin du support officiel de Windows 10 le 14 octobre, de nombreux ordinateurs, notamment dans les entreprises et les administrations, fonctionnent sans protection adéquate. Ces vulnérabilités sont devenues les portes d’entrée privilégiées pour les intrusions. Microsoft estime que 90 % des compromissions récentes sont liées à ce type de défaillances.
La sophistication des méthodes a également franchi un nouveau cap. Les assaillants s’introduisent dans les environnements cloud, utilisent des techniques de hameçonnage ciblé ou encore des logiciels espions dopés à l’intelligence artificielle. Certains groupes développent des campagnes de désinformation en exploitant l’IA générative pour produire de faux contenus difficilement détectables : présentateurs virtuels, voix synthétiques, images manipulées et documents falsifiés. L’objectif est clair : influencer, déstabiliser, tout en rendant l’origine des attaques presque impossible à tracer.
À l’échelle mondiale, les États-Unis restent les plus exposés, avec près d’un quart des attaques recensées au premier semestre 2025. Suivent le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Ukraine, le Canada, le Japon, l’Inde, les Émirats arabes unis et Taïwan. Microsoft met en garde contre l’émergence d’« acteurs IA-first », pour lesquels l’intelligence artificielle n’est plus un simple outil, mais le cœur de leur stratégie offensive.
Pour faire face à cette nouvelle réalité, l’éditeur appelle à une mobilisation urgente. Il préconise la généralisation de l’authentification multifactorielle, la surveillance active des infrastructures, la désactivation des comptes inutilisés, et surtout l’intégration de la cybersécurité dans les choix politiques et économiques. Microsoft plaide également pour un effort international de coopération, fondé sur le partage d’informations et une réponse collective à une menace devenue mondiale.
