Le réchauffement climatique ne menace plus seulement les écosystèmes. Il dégrade aussi les conditions de travail de milliards de personnes à travers le monde, alerte un rapport conjoint de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), publié vendredi à Genève.
L’augmentation des températures, désormais marquée par des vagues de chaleur plus fréquentes et plus intenses, expose une part croissante de la population active à un stress thermique dangereux. Pour chaque degré au-delà de 20 °C, la productivité des travailleurs chute de 2 à 3 %, soulignent les auteurs du document. En parallèle, les risques de déshydratation, de coup de chaleur, d’insuffisance rénale ou de troubles neurologiques s’accroissent.
Des secteurs entiers, comme l’agriculture, le BTP ou la pêche, sont déjà lourdement impactés, en particulier dans les pays à climat chaud où le travail manuel en extérieur reste majoritaire. Les effets du stress thermique touchent désormais aussi les régions tempérées, comme en témoigne la dernière canicule qui a frappé l’Europe.
« La chaleur extrême nuit à la santé et aux moyens de subsistance de milliards de travailleurs, notamment dans les communautés les plus vulnérables », a déclaré Jeremy Farrar, sous-directeur général de l’OMS. Ko Barrett, secrétaire générale adjointe de l’OMM, appelle à considérer cette menace comme une urgence à la fois sanitaire et économique.
Le rapport plaide pour une réponse structurée, sectorielle et coordonnée. Parmi les recommandations figurent l’élaboration de plans d’action adaptés aux réalités locales, la formation des professionnels de santé, l’implication des employeurs et l’intégration de technologies capables de surveiller les effets de la chaleur sur le terrain.
Les travailleurs à risque, comme les personnes âgées, malades ou fragilisées, doivent faire l’objet d’une attention particulière. Le rapport s’inscrit dans la lignée des travaux de l’Organisation internationale du travail, qui estime à plus de 2,4 milliards le nombre de travailleurs exposés à une chaleur excessive. Ces conditions extrêmes seraient responsables chaque année de plus de 22 millions d’accidents professionnels.
Pour Joaquim Pintado Nunes, responsable sécurité et santé à l’OIT, ce rapport constitue une étape importante pour repenser les politiques de protection du travail à l’ère du changement climatique.
Les deux agences appellent à une mobilisation rapide des gouvernements, employeurs et autorités sanitaires. Protéger la santé des travailleurs, insistent-elles, revient aussi à préserver la stabilité économique et sociale des sociétés.
