Depuis son lancement jeudi 19 juin, la 26ème édition du Festival Gnaoua et Musiques du Monde transforme Essaouira en un véritable carrefour des sons.
Tout a commencé jeudi soir sur la place Moulay Hassan avec un concert d’ouverture grandiose confié à Maâlem Hamid El Kasri. Son jeu de guembri puissant et sa voix grave ont résonné avec force, accompagné d’une fusion soigneusement construite avec la troupe de danse sénégalaise Bakalama, la chanteuse marocaine Abir El Abed et l’artiste sénégalaise Kya Loum. Ensemble, ils ont livré un spectacle à la fois spirituel et festif, mêlant les rythmes gnaoua à des chants d’Afrique de l’Ouest dans une harmonie parfaite. Le public, nombreux et enthousiaste, a rapidement été entraîné dans la transe.
Dans d’autres espaces du festival, les fusions ont également marqué les esprits. C’est le cas du concert du Maâlem Houssam Gania, fils du légendaire Mahmoud Gania, qui s’est associé au batteur américain Marcus Gilmore. Leur rencontre a donné naissance à un dialogue inattendu entre la tradition souiri et le jazz moderne. Le résultat, percutant et intense, a été ovationné par un public fasciné par la liberté d’improvisation et la profondeur du jeu.
Le lendemain, vendredi 20 juin, le festival a poursuivi sur sa lancée avec une deuxième soirée encore plus dense et audacieuse. L’un des concerts les plus marquants de la journée a été celui de Maâlem Khalid Sansi, qui s’est associé à Cimafunk, véritable star de la nouvelle scène cubaine. Ensemble, ils ont proposé une fusion explosive entre le funk cubain et les rythmes sacrés gnaoua. La complicité entre les musiciens, l’énergie de la scène et la réactivité du public ont fait de ce concert un moment d’anthologie. Essaouira a dansé, chanté, vibré.
Autre moment fort de la soirée, la rencontre musicale entre le musicien marocain Morad El Marjani et le virtuose tunisien Dhafer Youssef. Cette performance s’est construite autour de l’écoute, de la spiritualité et de la finesse. Le jeu du oud, aérien et méditatif, a trouvé un écho sensible dans le guembri, pour une fusion subtile, presque chamanique, qui a plongé le public dans une atmosphère méditative.
La scène féminine n’a pas été en reste. Asmaa Hamzaoui, pionnière des femmes maâlems, a monté sur scène avec son groupe Bnat Timbouktou et a été rejointe par la chanteuse malienne Rokia Koné. Leur performance conjointe a mis en lumière la puissance des héritages musicaux féminins du sud, unissant traditions gnaoua et sonorités mandingues dans une même ferveur. Un moment fort, chargé d’émotion et d’engagement.
La soirée s’est prolongée tard dans la nuit, notamment avec les lilas, ces cérémonies rituelles animées par les maâlems dans des cadres plus confidentiels. Véritables plongées dans l’univers mystique gnaoua, elles attirent toujours un public curieux de vivre l’expérience originelle de cette culture marocaine.
Alors que le festival entre dans sa dernière journée, la programmation de ce samedi s’annonce tout aussi prometteuse. Cimafunk reviendra en solo pour un concert qui promet d’être aussi festif qu’intense. Dhafer Youssef offrira également une performance solo, cette fois centrée sur sa propre spiritualité musicale, dans un concert très attendu. Aly Keïta, maître incontesté du balafon, présentera un projet fusion inédit mêlant mélodies africaines et rythmes gnaoua. Le collectif kurde Nishtiman Project se produira également dans un cadre plus intimiste au Borj Bab Marrakech, mêlant musiques ancestrales du Kurdistan à des harmonies contemporaines.
Deux jours après son ouverture, le Festival Gnaoua 2025 confirme encore une fois son rôle unique : celui d’un festival où la musique transcende les frontières, où le sacré se mêle au profane, et où Essaouira devient le théâtre vivant de rencontres exceptionnelles. Les concerts, riches en diversité, en spontanéité et en virtuosité, racontent une histoire collective : celle de l’ouverture, du respect des traditions et de l’audace artistique.